<173>Un vrai philosophe aurait examiné impartialement si ces armées nombreuses, entretenues pendant la paix, si ces guerres si coûteuses, comme elles le sont aujourd'hui, sont plus ou moins avantageuses que l'usage ancien d'armer à la hâte des paysans quand un voisin paraissait à craindre, d'entretenir cette milice par la rapine et par le brigandage, sans lui assigner de paye régulière, et de la licencier à la paix. L'unique avantage qu'avaient les anciens consistait en ce que le militaire ne leur coûtait rien en temps de paix; mais quand le tocsin sonnait, tout citoyen devenait soldat, au lieu qu'à présent, les conditions étant séparées, le cultivateur, le manufacturier continuent chacun leurs ouvrages sans interruption, pendant que la partie des citoyens destinée à défendre les autres s'acquitte de son emploi. Si nos grandes armées, entretenues dans leurs expéditions aux frais de l'État, sont coûteuses, il en résulte au moins l'avantage que les guerres ne peuvent durer que huit ou dix années au plus, et qu'ensuite l'épuisement des ressources oblige les souverains à se montrer, dans de certains cas, plus pacifiques qu'ils ne le seraient par inclination. Il résulte donc de nos usages modernes que nos guerres sont plus courtes que celles des anciens, moins ruineuses aux provinces qui leur servent de théâtre, et que nous devons aux grandes dépenses qu'elles entraînent les paix passagères dont nous jouissons et que l'épuisement des puissances rendra probablement plus longues.

Je passe plus outre. Notre ennemi des rois assure que les souverains ne tiennent point leur puissance d'autorité divine. Nous ne le chicanerons point sur cet article; il lui arrive si rarement d'avoir raison, que ce serait marquer de l'humeur de le contredire quand les probabilités sont pour lui. En effet, les Capet usurpèrent l'empire, les Carlovingiens s'en emparèrent par adresse et par artifice, les Valois et les Bourbons eurent la couronne par droit de succession. Nous lui sacrifions encore les titres d'images de la Divinité, de représentants de la Divinité, qu'on leur attribue si improprement. Les rois