<29>la mort du feu roi, le roi d'à présent le nomma gouverneur de son frère le prince Henri. M. de Stille était d'autant plus digne de cet emploi, qu'il réunissait les qualités du cœur aux talents de l'esprit et aux vertus militaires. Au renouvellement de l'Académie, M. de Stille en fut élu curateur. Il est honteux de le dire, mais il n'en est pas moins vrai qu'on trouve rarement parmi les personnes de naissance des esprits aussi éclairés que le sien, et un mérite aussi digne de l'Académie que l'avait M. de Stille. Il n'était point étranger parmi les différentes sciences que notre Académie réunit en corps; il aurait même été capable de nous enrichir de ses travaux littéraires, si ses différentes fonctions ne lui en avaient dérobé le temps. Son penchant le portait aux belles-lettres; il préférait aux sciences austères les grâces de l'éloquence, non pas cette profusion de mots qui n'opère qu'une espèce de bourdonnement agréable aux oreilles, mais la force des pensées qui, par des expressions majestueuses, force l'auditeur à les entendre, persuade, et entraîne les suffrages.

Il regardait les anciens comme nos maîtres, et leur donnait surtout la préférence sur les modernes par l'étude plus profonde de leur art qu'ils avaient faite. Nous lui avons souvent entendu dire qu'autrefois un homme pouvait devenir habile, parce qu'il ne consacrait ses talents qu'à l'art qu'il embrassait; mais que le goût de notre siècle pour l'universalité des sciences ne pouvait produire que des hommes superficiels en tout genre; et il regardait ce goût comme la cause de la décadence des lettres : il ne croyait pas que Virgile dût commenter Euclide, ni que Platon fît des vaudevilles, la vie d'un homme ne suffisant pas pour approfondir une science, La guerre tira bientôt M. de Stille de l'asile des Muses; il suivit le Roi en Moravie l'année 1742. Il reçut, en 1743, le régiment de cavalerie du prince Eugène d'Anhalt, et fut de la promotion des généraux-majors.a


a M. de Stille, colonel et adjudant général depuis le 23 juin 1740, fut nommé général-major le 6 mars 1744, et quatre jours plus tard, il devint chef du régiment du prince Eugène (régiment de cuirassiers no 6 de la Stammliste de 1806). Le 3 septembre 1745, le Roi lui fit expédier un nouveau brevet de général-major, daté du 22 novembre 1743.