<17>De nos censeurs irritent les cervelles.
Au demeurant, les hommes de nos temps,
Avec ces morts rangés en parallèles,
Ne sont meilleurs, ni ne sont plus méchants.
Si nos frondeurs me mettent en colère,
Je vais prouver à tout critique austère
Que les beaux-arts de nos farouches mœurs
Ont adouci la rage sanguinaire.
O jours heureux! ô siècle débonnaire!
Tu ne fournis trahisons ni fureurs;
Les cœurs pervers ne le sont pas sans honte,
Et c'est beaucoup gagner, selon mon compte.
Mais gardons-nous de pousser sur les bancs,
In barbara, d'ennuyeux arguments :
Convaincre un fat est une œuvre impossible,
Un envieux a-t-il l'esprit flexible?
Sombre ennemi des hommes à talents,
Pour ses péchés qu'il reste incorrigible.
Qu'en enrageant de la gloire d'autrui,
Rempli de fiel et plus amer qu'absinthe.
Amant des morts, il s'en fasse un appui;
S'il nous hait tous, ma foi, tant pis pour lui.
Que son œil louche et sa paupière éteinte
Verse des pleurs en voyant la vertu
Qui l'écrasa sous ses pieds abattu;
Qu'en ses discours il nomme avec emphase
De vieux héros, ses chéris, ses élus,
Qu'il aime tant parce qu'ils ne sont plus;
Qu'il en décore à son gré chaque phrase.
Mais si ces morts le mettent en extase,
Ce n'est, Fouqué, qu'en haine des vivants :
Ah! s'ils pouvaient de leur sombre demeure,
Au gré du ciel, ressusciter sur l'heure,
On entendrait, dès les premiers moments,
Nos vils censeurs à langues de serpents
Exagérer leurs défauts et leurs vices,