<18>Et leurs héros retourneraient là-bas
En maudissant de ces censeurs ingrats
Les trahisons et les noires malices.
Triste envieux, hurle, plein de fureur,
Contre ce siècle en grands hommes fertile;
Farouche aspic, vil calomniateur,
Va te bouffir de colère et de bile,
Contre nos jours exerce ta fureur,
Forge en secret ta satire imbécile :
Tu tente en vain d'en ternir la splendeur.
Eh! qu'importait aux bourgeois de Ninive
Qu'un pleutre triste, à cervelle chétive,
Leur annonçât mille calamités?
Rien ne troubla tant de prospérités;
Mais le prophète, oiseau de triste augure,
Au fond d'un arbre ou de quelque masure,
Où l'idiot en fureur se nicha,
De désespoir qu'on vît son imposture,
En frémissant sur ses pieds dessécha.
De l'envieux telle est la récompense :
Sur lui retombe enfin son impudence,
Et ces serpents dont il chérit l'attrait,
Cruels agents qui servent la vengeance,
Au fond du cœur le rongent en secret.
Méprisez donc tous les traits que l'envie
A décochés pour flétrir votre vie;
Sur vos vertus ses dents s'émousseront,
C'est vainement qu'elles vous morderont.
Censeurs cruels, révérez, mais sans feinte,
Tous les humains qui se firent un nom;
Jetez des fleurs dessus leur cendre éteinte;
En relevant leur réputation,
Que les vivants n'en souffrent point d'atteinte.
Oui, cher Fouqué, nous périrons un jour,
Dans deux mille ans nous vaudrons quelque chose,
Morts anciens, nous aurons notre tour.