<200>fonds de reconnaissance, de vénération et de tendresse avec lesquels je serai jusqu'au tombeau, etc.

232. A D'ALEMBERT.

Le 13 avril 1781.

La nature a voulu que la santé et l'espérance fussent nos introducteurs dans le monde, pour nous faire illusion sur les maux qui nous attendent; et, par une précaution outrée, cette même nature craignant que nous ne fussions trop attachés à cette maudite vie, elle nous envoie les maladies et les infirmités, pour que nous y renoncions avec moins de regret. Nous sommes tous les deux compris dans cette dernière classe; chaque jour nous faisons des pertes, et nous envoyons notre gros bagage prendre les devants,a assurés de le suivre dans peu. Cette goutte dont j'ai été incommodé, je m'en suis délivré par l'abstinence et par le régime. A présent je n'y pense plus, quoique je me prépare à quelque nouvelle visite de cette hôtesse importune. Tandis que la France fait bravement la guerre sur mer aux Anglais, j'ai combattu la goutte, et je l'ai prise par famine; il serait à souhaiter que les Espagnols en fissent autant à Gibraltar.

Nous avons eu quelque petit mouvement dans l'Église pour un sujet de la plus grande importance.b Vous savez que les protestants croient que la Divinité aime leur chant; je ne sais quel poëte allemand a cru trouver un tas d'inepties dans ces beaux cantiques, et en


a Voyez t. XXIII, p. 407, et t. XXIV, p. 297.

b Voyez J.-D.-E. Preuss, Friedrich der Grosse, eine Lebensgeschichte, t. III, p. 221 et suiv.