<96>leur démêlé, et leur offrent une médiation qu'il ne dépend pas d'eux de refuser; ainsi, au lieu de sang répandu, deux coups de plume terminent leurs petites querelles.

A quoi leur serviraient donc leurs forteresses? Quand même elles seraient en état de soutenir un siége de la longueur de celui de Troie contre leurs petits ennemis, elles n'en soutiendraient pas un comme celui de Jéricho devant les armées d'un monarque puissant. Si, d'ailleurs, de grandes guerres se font dans leur voisinage, il ne dépend pas d'eux de rester neutres, ou ils sont totalement ruinés; et s'ils embrassent le parti d'une des puissances belliqueuses, leur capitale devient la place de guerre de ce prince.

L'idée que Machiavel nous donne des villes impériales d'Allemagne est toute différente de ce qu'elles sont à présent; un pétard suffirait, et même un mandement de l'Empereur, pour le rendre maître de ces villes. Elles sont toutes mal fortifiées, la plupart avec d'anciennes murailles flanquées en quelques endroits par de grosses tours, et entourées par des fossés que des terres écroulées ont presque entièrement comblés. Elles ont peu de troupes, et celles qu'elles entretiennent sont mal disciplinées; leurs officiers sont, ou le rebut de l'Allemagne, pour la plupart, ou de vieilles gens qui ne sont plus en état de servir. Quelques-unes des villes impériales ont une assez bonne artillerie; mais cela ne suffirait point pour s'opposer à l'Empereur, qui a coutume de leur faire sentir assez souvent leur faiblesse.

En un mot, faire la guerre, livrer des batailles, attaquer ou défendre des forteresses, est uniquement l'affaire des grands souverains : et ceux qui veulent les imiter sans en avoir la puissance ressemblent à celui qui contrefaisait le bruit du tonnerre et se croyait Jupiter.a


a Salmonée, roi d'Élide.