<181>Et son rempart créé par l'hyperbole,
T'intimidait d'un vain épouvantait,
Pour dissiper ton protestant bercail!
Que ne pourrais-je enfin dire moi-même?
Neufchâtel seul me fournirait un thème;
Meni pourrait illustrer mes écrits;
Je citerais d'authentiques promesses,
Fausses autant que fourbes et traîtresses.
Mais taisons-nous, et qu'un profond mépris
De ses travaux soit à jamais le prix.
Croyez-vous donc, quand il cabale et trame
Tant de complots, que le perturbateur
A pu jouir d'un instant de bonheur?
Voyez, voyez quel tumulte en son âme
S'élève, croît à la moindre rumeur.
Au mot d'exil il pâlit, il se pâme;
Bientôt du Roi le bon accueil l'enflamme.
Ainsi, toujours peu sûr de sa faveur,
Il est flottant, et son esprit balance,
Ou vers la crainte, ou bien vers l'espérance.
Choiseul, Choiseul, consultez les experts,
Ils vous diront, mieux que ne font ces vers,
Que la fortune est lasse de vous suivre;
Vous n'avez plus que deux moments à vivre,
Et vous voilà dévoré par les vers.
Tout disparaît, s'évanouit ou passe,
Lois pour les rois, les grands et les sujets;
Pourquoi faut-il dans un si court espace
S'embarrasser d'aussi vastes projets?
N'est-on heureux qu'en désolant le monde?
Retz le fut-il en fomentant la Fronde?
J'aimerais mieux me livrer à Zénon,
Étudier Marc-Aurèle ou Socrate,
Que d'imiter ce fougueux Érostrate,
Objet d'horreur, d'abomination;
Quelque désir de briller qui nous flatte,
C'est s'avilir pour mériter un nom.