<9> commis de Law. Le duc de Bourbon devint régent du royaume après la mort du duc d'Orléans; mais ce ne fut qu'une régence passagère; le cardinal de Fleury lui fut substitué, et, prenant le timon des affaires, il ne répara pas seulement les finances et les pertes internes du royaume, il fit plus : par son habileté, par la souplesse de son esprit et par les apparences d'une modération extrême, il s'acquit la réputation de ministre juste et pacifique. Pour connaître les profondeurs et la sagesse de sa conduite, il est nécessaire de remarquer que rien n'attire plus la confiance des hommes qu'un caractère généreux et désintéressé : le cardinal soutint si bien ce caractère, que l'Europe, ou plutôt l'univers entier, se persuada qu'il était tel. Les voisins de la France dormaient en paix auprès d'un si bon voisin, et les ministres dont la politique était la plus renommée avaient mis au nombre de leurs principes invariables que, tant que le cardinal vivrait, vu son caractère et son grand âge, on pourrait être tranquille sur les entreprises de la France. C'était là le chef-d'œuvre du cardinal, et en quoi sa politique peut être préférée à celle des Richelieu et des Mazarin. Ce ministre habile, ayant conduit les choses au point où il les désirait, fit éclater tout à coup ses desseins. Le manifeste du Roi Très-Chrétien soutint encore les profondes impressions que le caractère juste du cardinal avait faites sur les esprits; il contenait en substance : « Que ce n'était point par des vues d'intérêt ou d'ambition que le Roi prenait les armes, que Sa Majesté se contentait de posséder un royaume florissant et de régner sur un peuple fidèle, et que ses intentions n'étaient point de reculer les bornes de sa domination. » Cependant les suites ont fait voir que l'amour de la paix uniquement a obligé Sa Majesté d'accepter la Lorraine, et de débarrasser l'Allemagne d'une province qui à la vérité lui avait appartenu depuis un temps immémorial, mais qui lui était à charge, vu sa situation peu convenable et isolée. D'ailleurs, pour établir la paix sur un fondement solide, il fallait nécessairement que la Lorraine fût cédée à la France, parce quelle