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DES MARCHES QUI CACHENT UN DESSEIN QUI NE SE MANIFESTE QUE PAR LA JONCTION DE L'ARMÉE. A L'OUVERTURE DE LA CAMPAGNE.

Étudiez la marche que le maréchal de Saxe fit faire à son armée pour former, l'année 1746, l'investissement de Mastricht; repassez les manœuvres que le maréchal de Saxe fit faire à un corps de ses troupes pour assiéger Bruxelles; relisez les dispositions du maréchal de Turenne pour rassembler en Lorraine son armée, avec laquelle il fondit ensuite par Thann et Belfort sur l'Alsace, et chassa les alliés de Colmar;a suivez le prince Eugène dans sa marche vers Turin, où il attaqua et força les retranchements des Français. Quelque chose de moins parfait, mais dans ce genre, ce fut la marche de nos troupes, l'année 1757, de la Saxe, de la Lusace et de la Silésie, pour se joindre à Prague.b Ces sortes de projets veulent être étudiés et si bien combinés, que tout joue comme les ressorts d'une montre, et que, par les différents mouvements des troupes, l'ennemi ne puisse pas deviner quel est le véritable dessein du général qui agit. Pour former et pour exécuter de semblables desseins, il faut bien connaître le pays où l'on se propose d'opérer, combiner les marches des différents corps pour qu'aucun d'eux n'arrive ni trop tôt, ni trop tard, afin que ces mouvements si subits et si décisifs rendent l'ennemi confus et surpris, et lui fassent commettre des fautes. Il faut avouer qu'il peut arriver, avec quelque soin que l'on ait calculé ces marches, qu'une de ces colonnes rencontre un corps de l'ennemi, et soit obligée de s'engager avec lui, ce qui doit naturellement la retarder; mais ces sortes de cas fortuits sont imprévoyables, et ne renverseront pourtant jamais le


a Voyez, t. I, p. 84; t. XXVIII, p. 104; et ci-dessus, p. 93.

b Voyez t. IV, p. 127 et suivantes.