<539>que rien ne pourra nous désunir, me remettant au reste sur la foi de sa promesse que le traité que nous sommes sur le point de conclureb restera un secret impénétrable pour tout le monde. Je regarde le changement qui est arrivé avec le sieur Amelot comme un coup de partie, et vous sais bon gré de tout ce que vous y avez contribué. Vous pouvez être assuré de ma discrétion sur tout ce que vous me mandez d'avoir fait avec le roi de France; et d'ailleurs je viens d'ordonner à Klinggräffc d'accabler de politesses le sieur de Chavigni, afin de le faire, comme vous dites, tout plein d'amitié de ma part et de le mettre dans mes intérêts; aussi est-il vrai que le roi de France met ses affaires dans de dignes mains, s'il emploie Chavigni à la place d'Amelot.

Quant au projet du traité, j'en ai été assez content, et il n'y a que peu de choses que je souhaite d'y être insérées encore, comme vous le verrez par le contre-projet chiffré que vous trouverez ci-clos. Vous tâcherez de votre mieux avec le sieur de Chambrier, afin qu'on admette tout ce que je viens ou de changer, ou de joindre à ce traité; et lorsque vous serez convenu de tout, mon intention est que vous devez le faire mettre au net et, les échanges des pleins pouvoirs faits, le signer avec le sieur de Chambrier, à quelle fin je vous envoie ci-clos les pleins pouvoirs nécessaires. D'abord que vous l'aurez signé, vous pouvez retourner vers ici, et m'apporter un des exemplaires signés, pour que j'en puisse faire expédier alors les ratifications usitées, ce que je ferai faire incontinent après que j'aurai de bonnes nouvelles de mon traité à faire avec la Russie et la Suède. Je renverrai alors le traité ratifié au sieur de Chambrier, pour qu'il le puisse échanger; mais il faudra de toute nécessité que vous vous concertiez bien avec le sieur de Chambrier, par quelle voie je puisse lui envoyer sûrement le traité pour qu'il ne soit point intercepté en chemin faisant : car je crains fort que la route par Wésel à Paris ne sera plus sûre, d'abord que les opérations de guerre auront commencé en Flandre. Je crains la même chose pour Francfort, et je ne sais pas s il y aura une autre roule plus sûre que celle


b Ce traité fut conclu à Versailles, le 5 juin 1744. Voyez t. III, p. 44 et 45, et t. IV, p. 35.

c Envoyé de Prusse auprès de l'empereur Charles VII, à Munich.