<138>amateurs de la sagesse, ce ne sera pas un vœu désagréable pour vous. Puissiez-vous donc, dans cette nouvelle année, vivre en paix, sans chicane, sans excommunication et sans anathème! et puisse cette lie du genre humain que vous nommez évéques devenir raisonnable et tolérante! Mais je crains bien qu'il ne soit aussi difficile de rendre vos prêtres humains que d'apprendre à parler aux éléphants. Bon Dieu, quel opprobre pour ce clergé de France de sévir si opiniâtrément contre ce grand homme que nous avons perdu! Je soutiens que ces tonsurés agissent en ingrats. Souvent Voltaire a émoussé les traits qu'il leur a lancés, pour que les blessures ne fussent pas trop vives. Quelqu'un qui les ménagerait moins pourrait les terrasser à ne s'en relever jamais; car tout n'est pas dit. Les philosophes ont escarmouche par-ci par-là; ils ont poussé des bottes; mais ces charlatans de la superstition n'ont pas encore été enfoncés, battus et dissipés entièrement. Les armes sont toutes prêtes pour ce combat, et si j'étais jeune, j'attaquerais comme Hercule cette hydre de Lerne, cette hydre papale dont tous les vices concentrés produisent des têtes renaissantes. Là, ce serait la vérité qui terrasserait leurs absurdes fables; ici, la vertu qui mettrait au jour ce tissu de crimes dont la hiérarchie ecclésiastique est souillée; mais ces armes veulent être maniées par des mains vigoureuses, et les miennes sont goutteuses. En naissant, j'ai trouvé le monde esclave de la superstition; en mourant, je le laisserai de même. La raison en est que le peuple avale douze articles de foi comme des pilules, et qu'il est plus revêche sur ce qui intéresse sa liberté et sa bourse; il ne prévoit point que, étant enchaîné par les dogmes, son esclavage en devient la suite inévitable. Quant à ceux qui vous harcèlent, je vous conseille de leur opposer l'armure de Fontenelle, sage qui, de tous les savants, a le plus évité de se commettre avec les vipères du sacré vallon. Pour moi, je combats tantôt contre les Autrichiens, tantôt contre la goutte; et quand je suis assailli de la dernière, puisque la nature m'a donné deux mains, je pense, quand le mal m'ôte l'usage de l'une, que c'est à l'autre à y suppléer. Maintenant j'ai chassé mon ennemi, j'ai mis dehors la goutte, qui aime la bonne chère, en lui prescrivant le régime des reclus de la Thébaïde. Aussi me suis-je