<2>Mes accents ne sont plus ceux d'un mortel profane,
C'est Apollon lui-même, animant mon organe.
Qui parle par ma voix;
Des destins éternels la volonté secrète
Se dévoile à mes yeux, je deviens l'interprète
De leurs augustes lois.

O Prussiens! c'est à vous que l'oracle s'adresse,
A vous, que le destin barbarement oppresse
Par tant d'adversités :
Sachez qu'aucun État dans sa grandeur naissante
Ne fournit sans revers la course triomphante
De ses prospérités :

Rome parut souvent au bord du précipice,
Sans que pour son secours l'appui d'un dieu propice
Repoussât son affront;
Les sénateurs en deuil pleuraient la république
Lorsqu'Annibal, vainqueur, de ses guerriers d'Afrique
Eut écrasé Varron.

Rome au sein du danger accrut son espérance;
Elle maintint ses murs bien plus par sa constance
Que par ses légions.
Mars, pour récompenser ce sublime courage,
Suscita pour vengeur d'un si cruel outrage
L'aîné des Scipions.

Du Tibre désolé le démon de la guerre
Transporte aux régions de la coupable terre
Le carnage et l'horreur;
Dans les champs africains l'ennemi prend la fuite,
Scipion sauve Rome, et Carthage est réduite
Sous les lois du vainqueur.