<135> donner de prise sur lui, M. Loudon n'avait pas quitté le pied des montagnes de toute la campagne, et il avait eu l'adresse d'exposer dans toutes les occasions les alliés de la maison d'Autriche aux marches, et aux entreprises les plus hasardées.

Le parti le plus avantageux que le Roi pût prendre dans cette situation, fut de gagner les hauteurs de Kunzendorf par une marche forcée, parce que, si l'on pouvait occuper cette position avant M. Loudon, on coupait l'armée autrichienne de ses magasins, et les Russes, qui ne pouvaient subsister que par les vivres que l'Impératrice-Reine leur fournissait, se seraient vus obligés, faute de pain, de se rapprocher des amas qu'ils avaient laissés en Pologne; de sorte que ce projet, heureusement exécuté, aurait changé pour cette campagne toute la face des affaires en Silésie. L'armée du Roi se mit aussitôt en marche, et le margrave, pour gagner du temps, détacha d'abord M. de Knobloch pour se saisir du Pitschenberg, par où l'armée devait nécessairement passer. Il l'occupa dès le soir, et le lendemain, l'armée entière déboucha aux environs de Jauernick et de Bunzelwitz. Mais le but qu'on s'était proposé, se trouva manqué. M. Loudon avait prévenu le Roi, et dès la veille, une vingtaine de bataillons de son armée s'était campée à Kunzendorf. Les hauteurs de Kunzendorf font un poste où les troupes qui s'y trouvent, sont inexpugnables. Il n'y avait point de coup de main à tenter, surtout parce qu'on découvrait l'armée autrichienne en pleine marche pour se rendre dans ce camp et le remplir dans toute son étendue.

L'armée du Roi, ne pouvant agir offensivement, se déploya de la montagne de Würben au village de Tschechen, où aboutissait la droite, dont une partie était couverte par le Nonnenbusch. Rien désormais n'apportait des obstacles à la jonction des Russes et des Autrichiens. L'on prévoyait que dans peu ces deux armées se rassembleraient aux environs de Schweidnitz. Dans ces conjonctures, le Roi avait à pourv oir à la sûreté de son camp et à la sûreté de la for-