<44> troupes hessoises au service de l'Empereur. Cela dérangea les mesures du roi d'Angleterre, qui comptait de les joindre à son armée. On essaya encore de dissuader le duc de Gotha de donner ses troupes aux puissances maritimes; cela ne réussit pas, car le duc avait déjà reçu des subsides.

Ce ministère de Versailles était nouveau; il s'était peu mis au fait des affaires, de sorte qu'il attribuait la paix séparée que le Roi avait faite avec la reine de Hongrie à la légèreté de son esprit. Il était nécessaire et comme un préalable, voulant se lier avec la France, de rectifier les idées des ministres sur ce point. Le baron de Chambrier, depuis vingt ans ministre de Prusse à la cour de Versailles, étant âgé, et n'ayant pas assez de liaisons avec les gens en place pour se servir auprès du Roi de leur crédit, avait d'ailleurs peu traité de grandes choses, et était scrupuleusement circonspect, Cela fit juger au Roi qu'il fallait envoyer quelqu'un à cette cour qui fut plus délié et plus actif, pour savoir à quoi s'en tenir avec elle. Son choix tomba sur le comte de Rottembourg.a En 1740 il avait passé du service de France à celui de Prusse; il était apparenté avec tout ce qu'il y avait de plus illustre à la cour : il pouvait par ces voies se procurer des connaissances qui auraient échappé à d'autres, et par conséquent informer le Roi de la façon de penser de Louis XV, de ses ministres et de ses maîtresses; car il fallait une boussole pour s'orienter. Le trop grand feu du comte Rottembourg pouvait se tempérer par le flegme de M. de Chambrier : tous deux pouvaient rendre des services utiles à l'État. Le comte de Rottembourg partit donc pour Versailles. Il fit faire ses premières insinuations par le duc de Richelieu et par la duchesse de Châteauroux.b On l'envoya à M. Amelot, ministre des


a Frédéric-Rodolphe comte de Rottembourg était alors général-major, mais le 18 mai 1745 il fut promu au grade de lieutenant-général. Né en 1710 à Polnisch-Netkow, dans la Nouvelle-Marche, il fut l'ami intime de Frédéric, et mourut à Berlin en 1751.

b Dans Flassan, l. c., p. 222-224, on voit combien madame de Châteauroux fut utile au roi de Prusse pour faire conclure le traité d'alliance de Versailles du 5 juin 1744.