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15. DU COMTE DE MANTEUFFEL.

Berlin, 23 mars 1736.



Monseigneur,

Votre Altesse Royale ne saurait m'accuser, pour cette fois-ci, de n'avoir pas agi en toute manière en véritable Quinze-Vingt. Je lui écrivis hier une lettre qui vaut par sa longueur toutes les Épîtres de saint Paul, et, par l'accident du monde le plus digne d'un Quinze-Vingt, je suis dans la nécessité de faire écrire par une main étrangère. Ayant veillé jusqu'à minuit pour achever d'en accoucher, je m'avisai de la relire avant que d'aller au lit, et, y ayant fait quelques corrections, je voulus y mettre du sable, quand par distraction je l'inondai si bien d'encre, qu'il fallut absolument la remettre au net. Je comptais de m'en acquitter moi-même ce matin, et de la rendre plus raisonnable en la réduisant à un volume plus petit; mais il n'y eut pas moyen. L'arrivée de la dernière lettre de V. A. R., j'entends celle du 20 du courant, me donna des idées si différentes, que je n'eus pas la patience de l'entreprendre. Je résolus de faire transcrire madite lettre par un de mes gens, et de la laisser d'ailleurs telle qu'elle était, c'est-à-dire, telle qu'elle est ci-jointe, me réservant de vous demander pardon de l'un et de l'autre, en cas que V. A. R. trouve mes raisons trop légères.

J'ai intimé à M. Beausobre qu'il faut qu'il se prépare à prêcher sur la nécessité du jugement futur, dès que V. A. R. sera à portée de l'entendre. Il m'a promis de le faire. Et comme c'est une matière fort ... et fort intéressante, il se flatte de la traiter de manière que V. A. R. ne désapprouvera pas tout ce qu'il en dira.

Je me garderai bien de répondre aujourd'hui à tout le contenu de votre lettre du 20 du courant. Je m'en acquitterai, avec la permission de V. A. R., un autre jour, et je me contenterai, pour le présent, de l'assurer très-humblement qu'elle me rend justice en se per-