220. DE LA MÊME.

Dresde, 16 mai 1779.



Sire,

Souffrez que, au milieu des transports de joie que la déclaration de la paix nous inspire, j'adresse mon hommage là d'où nous vient le plus grand des biens. C'est votre ouvrage, Sire; c'est vous qui avez dit aux hommes : Soyez justes, et apprenez à être désintéressés. Ils ont entendu votre voix, ils ont suivi votre exemple, et un des événements les plus funestes du siècle, qu'on redoutait depuis longtemps comme l'époque d'un long carnage, grâce à vos soins, n'a presque pas interrompu la tranquillité de l'Allemagne. Donner une paix solide qui n'ait point été cimentée par des flots de sang, et devenir le pacifica<357>teur du monde par les moyens mêmes qui pouvaient vous en rendre le conquérant, c'est une nouvelle espèce de gloire, la seule qui manquât à celle de V. M. Elle vous était due. Recevez les bénédictions du genre humain, dont vous faites le bonheur; c'est votre plus belle récompense; et permettez que je mêle aux acclamations publiques la voix d'un cœur qui vous honore le plus.

Je ne saurais vous exprimer, Sire, à quel point je sens le prix de votre bienfait. Je n'ai plus d'autre soin que d'en jouir le plus que je pourrai, et comme l'exemple de V. M. est excellent à suivre en toute chose, j'ai commencé l'usage de la gomme de gaïac; je m'en trouve très-bien. Puisse-t-elle contribuer à affermir votre santé, et elle seule aura fait aux hommes un bien plus grand que tout le mal attribué à la découverte de l'Amérique. Je prends la liberté d'adresser à V. M. une seconde lettre de la princesse de Gallean. Elle est loin de vous importuner par des prières; tous ses vœux se bornent à vous faire agréer, Sire, le pur hommage du plus profond respect. Je n'ai pu la refuser, sentant trop par moi-même à quel point ce désir est naturel, et combien je suis flattée chaque fois que j'ose vous renouveler les assurances de la haute estime et de l'admiration sans bornes avec laquelle je suis, etc.