<224> effet, quelle différence n'y a-t-il point entre des fainéants qui, croupissant dans la barbarie, dédaignent d'humaniser leurs mœurs par le commerce des Muses, et des hommes qui pensent et qui travaillent non seulement pour le bien de leurs semblables, mais encore pour leurs agréments! On dit que les titres de la noblesse espagnole se prouvent par la fainéantise; plus un homme est illustre, dans ces climats, et moins il est occupé. Je voudrais, pour le bien de ma nation, que ce fût le contraire chez nous, et qu'on ne fût réputé noble qu'à proportion qu'on méritât de l'être.

La musique a d'ailleurs une propriété qui l'égale à l'éloquence la plus véhémente et la plus pathétique; de certains accords touchent et remuent merveilleusement l'âme, c'est une manière de parler à l'esprit, et lorsqu'on est assez habile pour en faire usage, on peut communiquer ses passions aux auditeurs.

On exécutera un de ces jours les cantates que je tiens par votre bonté et de vos soins. J'aurai la satisfaction d'entendre vos pensées, quoique je voudrais beaucoup plus volontiers encore jouir de votre conversation; je me flatte toujours que ce sera pour le printemps prochain.

Le capitaine Wylich, de mon régiment, doit vous avoir délivré, à ce que je crois, la lettre dont je l'ai chargé; il y a près de quinze jours qu'il est parti.

Ne m'oubliez pas, mon cher comte, et soyez persuadé que ce m'est une joie inexprimable d'avoir acquis un ami de votre mérite. Ils sont trop rares pour n'en point connaître tout le prix; la seule difficulté qu'il y a, c'est de répondre de son côté.

Je suis avec toute l'estime du monde,



Mon cher comte,

Votre très-fidèlement affectionné ami,
Federic.