<55>tromanie que je dois reprocher cette sottise et bien d'autres que j'ai faites dans ma vie. Souhaitez-moi par reconnaissance que celle-ci soit la dernière.

(Mai 1738.)

II.

Permets, sage Jordan, que, plein de bile noire,
Des maux de mes égaux je te fasse l'histoire,
Et qu'en examinant l'humaine infirmité,
Elle nous apprivoise à sa nécessité.
L'homme, dès le moment que sa faible paupière
S'ouvre, et qu'il voit du jour l'éclatante lumière,
Nous semble, par ses cris et par son air chagrin,
Pressentir quel sera son malheureux destin.
En effet, la douleur d'abord lui fait la guerre;
De ce monstre odieux tel est le caractère;
Sous des noms différents il cache son venin,
Il est cruel, barbare, et toujours inhumain.
D'abord, d'un os aigu revêtant la figure,
Il perce la gencive à l'abri de l'enflure;
Tantôt, en nous couvrant de ses bourgeons hideux,
Il laissa de ses maux des souvenirs affreux.
C'est sa rage qui souffle aux feux ardents des fièvres :
Voyez ce malheureux; son âme est sur ses lèvres,
Et son sang échauffé, pressé violemment,
De canaux en canaux roule rapidement.
Et toi, fille d'enfer, implacable migraine,