<220>L'un disait blanc, quand l'autre disait noir;
L'un veut manger, on lui présente à boire;
Ils semblaient fous ou privés de mémoire,
Se chamaillant du matin jusqu'au soir.
Voilà comment les Polonais parurent
A cette diète où leurs clameurs élurent
Un autre roi. Mais comment s'y prit-on?
Tout député nommait un autre nom;
L'un voulait Paul, l'autre, Jean, l'autre, Pierre.
Enfin le trouble et la confusion
Auraient bientôt mis la Pologne entière
Dans le désordre et la subversion,
Si, vers le Nord, leur illustre voisine
N'eût par bonté prévenu leur ruine;
Et la Vistule avec plaisir alors
Vit arriver sur ses célèbres bords
De preux Russiens une illustre ambassade
Pour leur donner et bal, et sérénade.
« O Polonais! pourquoi chez l'étranger
Choisirez-vous un roi pour vous juger?
Et pourquoi donc un staroste, un Sarmate
Ne pourra-t-il se couvrir d'écarlate,
Porter le sceptre, et, sur le trône assis,
Justifier que vous l'avez choisi? »
Dit en son nom Repnin à l'assemblée.
Rien ne toucha cette masse aveuglée.
Il fallut donc expliquer l'oraison
A tous ces sourds, porteurs de deux oreilles;
On se servit pour truchement, dit-on,
De l'avocat des rois, du gros canon.a


a Voyez t. XI, p. 134.