<578>J'ai placé, Sire, ce portrait dans mon cabinet, entre Des Cartes, Newton, Henri IV et Voltaire; et j'espère que V. M. ne me reprochera pas de l'avoir mise en mauvaise compagnie. J'en reste là, Sire, honteux d'abuser si longtemps du temps précieux de V. M. J'ajouterai seulement que si V. M. avait encore besoin de quelques bons sujets pour son Académie des nobles ou pour quelque autre objet, je ne désespère pas de pouvoir les lui procurer.

118. A D'ALEMBERT.

Le 17 septembre 1772.

Le professeur en rhétorique dont vous venez de faire l'emplette ajoute aux obligations que je vous avais déjà, et contribuera à perfectionner une académie que j'ai beaucoup à cœur, et dont les progrès ont jusqu'ici assez bien répondu à mon attente. Le soin de l'éducation est un objet important que les souverains ne devraient pas négliger, et que j'étends jusqu'aux campagnes. Ce sont les hochets de ma vieillesse,a et je renonce en quelque manière à ce beau métier dont M. de Guibert donne de si éloquentes leçons. La guerre demande une jeunesse vive, et ma vieillesse pesante n'y convient plus; d'ailleurs, me conformant aux sentiments de nos maîtres les encyclopédistes, je ne me contente pas de maintenir mon petit domaine en paix, je prêche encore cette paix aux autres. J'espère que le Turc m'en croira, quoique bien d'autres qui se mêlent du métier lui prêchent la guerre. Cependant j'ai encore une péroraison en poche, qui, j'espère, l'emportera sur les phrases des prédicants guerriers. Enfin, vous aurez ce sixième chant des Confédérés, pour qu'il ne vous manque aucune des sottises qui m'ont passé par la tête.

En qualité de prophète, j'annonce la paix, quoiqu'elle ne soit point encore conclue; s'il y avait moins de difficultés à la terminer, le temple de Jérusalem pourrait être réédifié par un des ar-


a Voyez ci-dessus, p. 436.