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42. AU MÊME.

Meissen, 26 novembre 1762.

J'ai reçu, mon cher mylord, votre lettre et celle du philosophe sauvage. Il faut avouer que l'on ne saurait pousser le désintéressement plus loin qu'il le fait; c'est un grand pas à la vertu, si ce n'est la vertu même. Il veut que je fasse la paix; le bonhomme ne sait pas la difficulté qu'il y a d'y parvenir, et, s'il connaissait les politiques avec lesquels j'ai affaire, il les trouverait bien autrement intraitables que les philosophes avec lesquels il s'est brouillé.

Nous allons entrer dans les quartiers d'hiver; la campagne est heureusement écoulée.

Vous me demandez mon portrait; je ne sais, mon cher mylord, s'il en existe. Je vous envoie une figure plus aimable que la mienne, et qui vous fera plus de plaisir; il est bien juste que je donne une tabatière à celui qui m'a tant fourni de tabac. Vos Anglais me donnent bien de la tablature, et votre cher compatriote Butea est un singulier seigneur. Adieu, mon cher mylord; comptez toujours sur mon amitié, car mon cœur est tout à vous.

43. AU MÊME.

Leipzig, 28 janvier 1763.

Votre lettre, mon cher mylord, m'a trouvé au milieu des agitations les plus vives. Nous sommes sur le point de faire la paix; la négociation se pousse avec vigueur; je ne veux être ni dupe, ni fripon, et faire la meilleure paix que comportent les conjonctures où je me trouve. Voilà bien des soins et des embarras; toutefois je les préfère à ceux qu'exige l'ouverture d'une nouvelle campagne, trop heureux, après sept actes, de trouver la fin d'une mauvaise pièce dont j'ai été acteur malgré moi. Voilà un dénoû-


a Voyez t. V, p. 173 et suivantes.