<91>sances possibles pour les Français; il a cédé dans des bagatelles, et les a menés dans les grandes choses. Nous avons fait crier et pleurer les Saxons. Nous avons inondé Paris et Versailles de nouvelles que nous avions bien accommodées aux conjonctures. Enfin, l'amour-propre des Français, l'envie qu'ils ont de se mêler de tout, le prétexte favori de la paix de Westphalie, que les conjonctures nous ont fait trouver très-bon, la vanité de protéger la maison impériale et celle de Saxe, et surtout l'espérance de jouer le rôle d'arbitres d'Allemagne, enfin les lettres de l'Impératrice à . . . .a vous m'entendez bien, toutes ces choses ensemble ont fait prendre le change aux Français, et dès que le premier pas s'est trouvé fait, il ne nous a plus été difficile de leur en faire faire d'autres. Vous voyez comme le comte de Kaunitz les mène. Quelle dépense en argent, en subsides! et quel nombre de troupes ne les oblige-t-il pas d'employer pour le service de notre auguste souveraine! Vous dites que les Français sont nos éternels ennemis. Eh! tant mieux pour le comte Kaunitz. Pouvait-il donc faire un plus grand coup, un coup d'une plus fine politique, que de se servir des ennemis de la maison d'Autriche pour travailler au plus grand agrandissement de cette maison? Pouvait-il mieux faire que d'épuiser la France d'hommes et d'argent pour la réduire dans un état d'épuisement qui la rendra peu redoutable pour l'avenir? Vous trouvez mauvais que l'on ait fait quelques cessions aux Français dans la Flandre. C'est sur quoi je n'ose vous répondre; mais supposé que cela soit, ne voyez-vous pas quel art il y a de se préparer de loin de nouveaux alliés? Dès que nous voudrons faire la guerre à la France, le nom de ces places seules à reconquérir sonnera le tocsin en Hollande et en Angleterre; cela seul ameutera les puissances maritimes, et les obligera à sacrifier leurs troupes et leurs trésors pour nos intérêts. Ne précipitez donc plus votre jugement, et sachez que la conduite de monseigneur le comte est exactement calculée, que tous ses pas sont mesurés, et ses projets mûrement approfondis et pesés. Ne craignez donc plus ces Français que leur amour-propre aveugle, et qui, à force de se croire trop fins, sont joués par les autres. Nous connaissons leur fort et leur faible, et dès que les


a La marquise de Pompadour. Voyez ci-dessus, p. 89.