<189>Et jaillissant de son généreux flanc,
S'en va tout droit dans un riche couvent.
Ce jour, sa châsse en pompe se promène,
Et le gardien et les religieux,
Et les dévots que fournissent tous lieux,
Qu'à pareil jour on trouve à la douzaine,
Suivent le saint d'un air humble et piteux.
A son honneur ils fêtent la neuvaine,
En s'enivrant d'un vin délicieux.
J'ai la berlue, ou je crois, Dieu me damne,
Parmi ces saints que j'aperçois un âne.
Pourtant n'est pas celui-là qui parla,
Quand Balaam autrefois le monta;a
Mais c'est celui qui le Sauveur porta,
Lorsque, l'Hébreu célébrant son entrée.
Jérusalem, de palmes décorée,
Jusques au temple un jour l'accompagna.
Cet animal, sur une vapeur bleue,
Va dans Milan pour retrouver sa queue.
Là, tous les ans, de l'animal béat
On donne au jour ce beau membre en spectacle.
Prêtres y sont en grand pontificat,
A deux genoux attendant le miracle,
Et célébrant sa fête avec éclat.
Le bon Janvier, avec son auréole,
Comme un éclair va trouver Don Carlos;
Il fait bouillir son sang dans sa fiole,
Tout pleins de joie en sont ses bons dévots.
Le doux . ., ce mari si modeste,
Pauvre Vulcain de la troupe céleste,
Et les vieux saints, comme Hercule, Samson,
Mars, Machabée, et Gabriel, Mercure,
Tous trop âgés, restent à la maison :
Ils n'étaient plus que des saints en peinture.


a Nombres 22, 28.