<225> l'asile de notre bonheur. Mais comme ces lois ne pouvaient ni se maintenir ni s'exécuter sans un surveillant qui s'en occupât sans cesse, ce fut l'origine des magistrats, que le peuple élut et auxquels il se soumit. Qu'on s'imprime bien que la conservation des lois fut l'unique raison qui engagea les hommes à se donner des supérieurs, puisque c'est la vraie origine de la souveraineté. Ce magistrat était le premier serviteur de l'État.a Quand ces sociétés naissantes avaient à craindre de leurs voisins, le magistrat armait le peuple et volait à la défense des citoyens.

Cet instinct général des hommes qui les anime à se procurer le plus grand bonheur possible donna lieu à la formation des différents genres de gouvernement. Les uns crurent qu'en s'abandonnant à la conduite de quelques sages, ils trouveraient ce bonheur; de là le gouvernement aristocratique. D'autres préférèrent l'oligarchie. Athènes et la plupart des républiques grecques choisirent la démocratie. La Perse et l'Orient ployaient sous le despotisme. Les Romains eurent quelque temps des rois; mais lassés des violences des Tarquins, ils tournèrent la forme de leur gouvernement en aristocratie. Bientôt, fatigué de la dureté des patriciens, qui l'opprimaient par des usures, le peuple s'en sépara, et ne retourna à Rome qu'après que le sénat eut autorisé les tribuns que ce peuple avait élus pour le soutenir contre la violence des grands; depuis, il devint presque le dépositaire de l'autorité suprême. On appelait tyrans ceux qui s'emparaient avec violence du gouvernement, et qui, ne suivant que leurs passions et leurs caprices pour guides, renversaient les lois et les principes fondamentaux que la société avait établis pour sa conservation.

Mais quelque sages que fussent les législateurs et les premiers qui


a Voyez t. I, p. 142, et t. VIII, p. 72, 190 et 335.