<119> ils peuvent avoir de mauvais procédés envers vous, ils peuvent vous envier, parler de vous en termes déshonnêtes, vous causer des désagréments, peut-être même travailler à votre ruine. Comment concilierez-vous alors la rigidité de votre devoir avec l'intérêt de votre bonheur?

RÉPONSE. Dès que j'aurais calmé les premiers moments d'indignation que leur conduite m'aurait inspirés, je me ferais gloire d'être plutôt l'offensé que l'offenseur; ensuite je leur parlerais, je leur dirais que, respectant en eux le sang que mon père et ma mère leur ont transmis, il me serait impossible d'agir envers eux comme envers des ennemis déclarés, mais que je prendrais mes précautions pour les empêcher de me nuire. Ce procédé généreux pourrait les ramener à la raison, et si cela n'arrivait pas, j'aurais toutefois la consolation de n'avoir aucun reproche à me faire; et comme un pareil procédé doit s'attirer l'applaudissement des sages, je me trouverais suffisamment récompensé.

DEMANDE. A quoi vous servirait cette générosité?

RÉPONSE. A conserver ce que j'ai de plus précieux au monde, une réputation sans tache, sur laquelle je fonde tout mon bonheur.

DEMANDE. Quel bonheur peut-il y avoir dans l'opinion que les hommes ont de vous?

RÉPONSE. Ce n'est pas sur les opinions des autres que je me fonde, mais sur la satisfaction ineffable que j'éprouve en me trouvant digne d'un être raisonnable, humain et bienfaisant.

DEMANDE. VOUS disiez auparavant que si vous aviez des enfants, vous auriez plus de soin à les rendre vertueux que de leur amasser des richesses. Pourquoi pensez-vous si peu à établir leur fortune?

RÉPONSE. Parce que les richesses n'ont aucun prix par elles-mêmes, et n'en acquièrent que par le bon usage qu'on en fait. Or, si je cultive les talents de mes enfants, si je les forme aux bonnes mœurs, leur mérite personnel fera leur fortune; au lieu que si je ne