<182> scrupule; d'autant plus que, par les alliances, ils rendent leur protection plus efficace à leurs peuples.

Toutes les guerres donc qui n'auront pour but que de repousser les usurpateurs, de maintenir des droits légitimes, de garantir la liberté de l'univers, et d'éviter les oppressions et les violences des ambitieux, seront conformes à la justice. Les souverains qui en entreprennent de pareilles n'ont point à se reprocher le sang répandu : la nécessité les fait agir; et dans de pareilles circonstances, la guerre est un moindre malheur que la paix.

Ce sujet me conduit naturellement à parler des princes qui, par un négoce inouï dans l'antiquité, trafiquent du sang de leurs peuples; leur cour est comme un encan où leurs troupes sont vendues à ceux qui offrent le plus de subsides.a

L'institution du soldat est pour la défense de la patrie; les louer à d'autres, comme on vend des dogues et des taureaux pour le combat, c'est, ce me semble, pervertir à la fois le but du négoce et de la guerre. On dit qu'il n'est pas permis de vendre les choses saintes : eh! qu'y a-t-il de plus sacré que le sang des hommes?

Pour les guerres de religion, si ce sont des guerres civiles, elles sont presque toujours la suite de l'imprudence du souverain, qui a mal à propos favorisé une secte aux dépens d'une autre, qui a trop resserré ou trop étendu l'exercice public de certaines religions, qui surtout a donné du poids à des querelles de parti, lesquelles ne sont que des étincelles passagères quand le souverain ne s'en mêle pas, et qui deviennent des embrasements quand il les fomente.

Maintenir le gouvernement civil avec vigueur et laisser à chacun la liberté de conscience, être toujours roi et ne jamais faire le prêtre, est le sûr moyen de préserver son État des tempêtes que l'esprit dogmatique des théologiens cherche toujours à exciter.

Les guerres étrangères de religion sont le comble de l'injustice et


a Voyez t. VI, p. 132.