<157>lement établi en Europe, par conséquent de grands vassaux nés ennemis de leurs seigneurs suzerains, intéressés à soutenir les excommunications que les pontifes fulminaient contre le souverain, des princes voisins, jaloux ou ennemis de l'excommunié, des prêtres uniquement attachés au saint-siége et indépendants de leurs maîtres temporels : que de moyens pour tourmenter les rois, et que d'intérêts ne concouraient pas pour fournir aux papes des exécuteurs ardents et zélés de leurs bulles!

Nous ne rappellerons point ici la querelle des Empereurs et des pontifes au sujet de leurs prétentions sur la ville de Rome, au sujet des investitures par la crosse et l'anneau; ni leurs brouilleries, auxquelles les terres de la succession de la comtesse Mathilde donnèrent lieu : personne n'ignore que ces causes secrètes produisirent uniquement les fréquentes excommunications de tant de rois et empereurs. Cette espèce d'orgueil qui s'engendre dans le sein d'une puissance sans bornes, n'éclata jamais avec plus de scandale que dans la conduite de Grégoire VII envers l'empereur Henri IV. Enfermé dans son château de Canosse avec la comtesse Mathilde, il força ce prince aux soumissions les plus basses et les plus honteuses avant de l'absoudre. Toutefois il ne faut pas se figurer que les excommunications et les bulles portassent également coup : elles furent plus redoutables aux Empereurs qu'aux rois de France; la couronne était censée indépendante dans les Gaules, et les Français ne reconnaissaient le pouvoir des évêques de Rome que pour le spirituel.

Cependant, tout puissants qu'étaient les papes, cela n'empêchait pas que chaque excommunication d'un empereur n'attirât une guerre civile en Italie. Souvent le trône des pontifes en était ébranlé; quelques-uns, chassés de leur métropole, et fugitifs en d'autres provinces, se procuraient des asiles chez quelque souverain ennemi de leur persécuteur. Il est vrai qu'on les voyait retourner triomphants à Rome, non par la force, mais par adresse; tant leur politique était supérieure