<156> pontife, mais parce qu'il est dit que Samuel oignit les rois Saül et David. Les souverains ne voulaient rendre hommage, par cette cérémonie, qu'à celui qui, d'un acte de sa volonté, élève, ébranle, soutient ou bouleverse les empires. Les papes ne l'entendaient pas ainsi. Dès le règne de Louis le Débonnaire, fils de Charlemagne, Grégoire IV, en exaltant sa puissance spirituelle au-dessus de la temporelle, fit sentir à cet empereur que son père tenait sa couronne et l'empire du saint-siége. Telle fut l'explication que les papes, interprètes des mystères, donnèrent au sacre des souverains. Ils étaient censés vicaires de Jésus-Christ, ils se disaient infaillibles, et on les adorait. Les ténèbres de l'ignorance allaient en s'épaississant de siècle en siècle : que fallait-il de plus pour étendre et pour accréditer l'imposture?

La politique du clergé, toujours active, faisait consécutivement de nouveaux progrès. Un moine, nommé Hildebrand, d'un caractère arrogant, austère et audacieux, plus connu sous le nom de Grégoire VII, jeta les vrais fondements de la grandeur papale. Il ne garda aucune mesure : il s'attribua le droit de conférer et d'ôter les couronnes, d'interdire les royaumes, de délier les sujets du serment de fidélité; il ne mettait point de fin à ses prétentions, dont on peut se convaincre par cette fameuse bulle In coena Domini qu'il publia. C'est de son pontificat qu'il faut dater l'époque du despotisme de l'Église. Ses successeurs attribuèrent dans la suite au clergé les priviléges dont avaient joui les tribuns de l'ancienne Rome : leurs personnes furent déclarées inviolables; pour les soustraire entièrement à la domination de leurs souverains légitimes, les conciles décidèrent que l'inférieur ne pouvait en aucun cas juger le supérieur, ce qui, dans le style du temps, signifiait que les princes n'avaient aucune autorité sur les ecclésiastiques de leurs États. Par ce moyen, l'évêque de Rome s'assurait d'un parti, d'une milice prête à combattre à ses ordres dans tous les empires. Quelque extravagantes que nous paraissent de telles entreprises, elles ne l'étaient point alors : la faiblesse du gouvernement féodal généra-