<159>Quoique ces différentes mesures levassent bien des obstacles, il restait encore d'autres difficultés à résoudre pour que tout fût aplani. Ces difficultés venaient des ministres de Russie, qui avaient peu ou point d'idée du tout du système germanique. Quelque soin que se fût donné le czar Pierre, et les impératrices qui lui ont succédé, de policer le vaste empire de la Russie, il s'en fallait de beaucoup que les lumières y fussent aussi répandues que dans le reste de l'Europe. La succession de la Bavière, texte qui demandait des commentaires, devait être discutée par le droit public, par le droit féodal, par le droit coutumier, et par les traités qui en constataient la validité. Les ministres de Russie, peu instruits de ces connaissances, étaient dans l'état qu'on nomme, dans les écoles, d'ignorance invincible. Pour les mettre donc à même déjuger de l'état de la cause, il fallait descendre jusqu'aux détails les plus minutieux, leur faire comprendre en quoi consiste le droit des agnats, leur expliquer ce qu'il y avait de vicieux dans le traité que l'Électeur palatin avait signé avec l'Empereur, parce qu'il lui manquait le consentement du prince de Deux-Ponts, sans lequel l'Électeur palatin n'était pas en droit de transiger et de sacrifier ainsi la partie majeure de son héritage. Toutes ces écritures demandaient un détail immense, auquel se joignait l'éloignement des lieux; ce qui absorba du temps. Néanmoins la cour de Pétersbourg fut convaincue des procédés iniques de l'Empereur, et elle comprit que ce prince, qui ne devait être que le chef de l'Empire, aspirait à s'en rendre le tyran.

On négociait donc ainsi dans toutes les cours de l'Europe, tandis qu'à Vienne on s'apercevait, par les mémoires que le baron de Riedesela présentait au nom de la Prusse, que, touchant la succession de Bavière, on raisonnait à Berlin sur des principes tout opposés à ceux


a Jean-Hermann baron de Riedesel, depuis le 8 août 1773 envoyé de Prusse auprès de la cour impériale. Après la paix de Teschen, il y fut de nouveau accrédité le 27 juillet 1779. Il mourut dans le village de Hitzing, près de Vienne, le 20 septembre 1785.