<131> faible pour remplir le dessein qu'on voulait exécuter; il fallait donc avoir une armée, quoiqu'on sentît toutes les difficultés qui s'opposaient à trouver ce monde et à le rassembler. Les Anglais ont manqué de tout temps d'art et de souplesse dans leurs négociations : attachés avec acharnement à leurs intérêts, ils ne savent pas flatter ceux des autres; ils pensent qu'en offrant des guinées, ils peuvent tout obtenir. Ils s'adressèrent d'abord à l'impératrice de Russie, et la choquèrent d'autant plus par leurs demandes, que la fierté de cette princesse regardait comme bien au-dessous d'elle d'accepter des subsides d'une autre puissance. Enfin, ils trouvèrent en Allemagne des princes avides ou obérés qui prirent leur argent; ce qui leur valut douze mille Hessois, quatre mille Brunswicois, douze cents hommes d'Ansbach, autant de Hanau, sans compter quelques centaines d'hommes que leur fournit le prince de Waldeck. Outre cela, la cour envoya quatre mille Hanovriens à Gibraltar et à Port-Mahon pour relever les garnisons anglaises de ces places, lesquelles furent de là conduites en Amérique. Toutes ces troupes servirent sous les auspices du lord Howe et de son frère l'amiral, comme nous le rapporterons en son temps. Chaque campagne coûta à l'Angleterre six millions de livres sterling, ou trente-six millions d'écus. On comptait alors que les dettes de la Grande-Bretagne montaient déjà à neuf cents millions d'écus. Une campagne ne suffisait pas pour soumettre les colonies; ainsi l'on prévoyait dès lors que dans peu la dette nationale dépasserait un milliard.

La campagne suivante ne produisit aucun événement décisif, et les Américains se soutinrent contre le lord Howe et tous les renforts qui l'avaient joint; mais vers la fin de l'année 1777, la fortune commença à se déclarer en faveur des colonies. Sur les ordres de la cour, le général Burgoyne partit du Canada avec treize mille hommes, pour se rendre à Boston, selon le projet qu'on lui avait donné à exécuter; tandis que le lord Howe, qui n'était informé de rien, s'était emparé