<179>tentats, des actions aussi noires, aussi abominables, doivent être rendues dans toute leur atrocité, pour épouvanter, par le jugement que la postérité en portera, tous ceux qui seraient capables d'en commettre de pareilles.

Bute, dont nous avons parlé, non content de vouloir embrouiller les affaires de la Prusse à Pétersbourg, négociait en même temps à la cour de Vienne. Il voulait à l'insu du Roi faire sa paix avec la maison d'Autriche. Libéral des provinces prussiennes, peu scrupuleux de sacrifier les intérêts du Roi, il offrait ses dépouilles à l'Impératrice-Reine, comme s'il était le maître d'en disposer. Dans cette occasion, le hasard servit encore mieux le Roi que n'auraient pu faire les plus fines intrigues. Le comte Kaunitz prit ces ouvertures de travers; il soupçonna que le dessein de l'Angleterre était de commettre la cour de Vienne avec celle de Versailles, et il répondit au sieur Bute avec toute la hauteur et toute la morgue d'un ministre autrichien; il rejeta avec dédain et avec un mépris insultant des propositions qu'il jugeait être captieuses, en ajoutant que l'Impératrice-Reine était assez puissante pour se faire raison de ses prétentions, et qu'il était contre sa dignité d'accepter une paix, quelle qu'elle pût être, dont l'Angleterre se rendrait la médiatrice. Ainsi avorta ce projet, à la honte de celui qui l'avait formé.

Malgré tant d'événements heureux et de trames découvertes, le Roi n'était cependant pas exempt d'inquiétudes. Les lettres de Pétersbourg faisaient trembler pour la personne de l'Empereur; elles annonçaient toutes un germe de conspiration qui était prêt à éclore. Les personnes qu'on soupçonnait de ce complot, en étaient les moins coupables. Les véritables auteurs tramaient dans le silence, et se dérobaient avec soin à la connaissance du public. A peine l'Empereur parvint-il au trône, qu'il fit des innovations continuelles dans l'intérieur de ses États; il s'appropria les terres du clergé, selon le projet que Pierre Ier en avait fait; mais il s'en fallait bien que Pierre III fût