<15> négligence; ce qui l'obligea de se replier sur Züllichau. Le Roi, étant informé de la confusion qui régnait dans cette armée, et de la désunion qu'il y avait parmi les généraux, y envoya M. de Wedell, qui en prit le commandement comme dictateur, quoiqu'il ne fût pas le plus ancien par le grade.

Le même soir que M. de Wedell arriva à Züllichau, M. de Soltykoff campait à Babimost, d'où il avait si bien tourné la position des Prussiens durant la nuit, qu'une partie des Russes occupait déjà le défilé de Kay, derrière les Prussiens, précisément entre leur camp et le chemin de Crossen, sans que personne s'en aperçût, tant le service se faisait négligemment dans l'armée dont M. de Wedell venait de prendre le commandement. M. de Wedell apprit cette marche par ses propres yeux; il alla reconnaître le camp de Babimost, et n'y vit que la queue des colonnes et l'arrière-garde, qui suivaient le chemin de Crossen. Il fit d'abord abattre ses tentes, se mit en marche, attaqua les troupes ennemies qui s'étaient établies à Kay, espérant de les battre avant que leur armée pût les joindre; mais les affaires tournèrent autrement. Les Russes étaient bien postés : on ne pouvait aller à eux que par un front de sept bataillons de largeur, resserré des deux côtés par des marais. Les Russes étaient comme en demi-lune, sur trois lignes, occupant des tertres chargés de sapins. M. de Wedell enfonça leur première ligne; lorsqu'il voulut attaquer la seconde, son infanterie se trouva exposée à un si grand feu de mitraille, partant de différentes batteries établies en croisière, qu'elle n'y put résister. On fit à trois reprises de nouveaux efforts, mais en vain. Le grand mal venait de ce que M. de Wedell ne pouvait pas opposer assez de canon à celui de l'ennemi. Il avait perdu du monde, et voyant peu d'apparence de réussir, il ne voulut pas sacrifier le reste inutilement. Il prit la résolution de se retirer; les troupes passèrent le lendemain l'Oder à Tschicherzig, pour se camper à Sawade. Pour les Russes, M. de Soltykoff les mena à Crossen. M. de Wedell perdit dans cette