<165> avaient manqué : il fallait chercher des ressources, et il était bien difficile de s'en procurer. Cet embarras était grand; les dangers que les ennemis préparaient à l'État, étaient bien plus terribles. Voici comme le Roi en fut informé. Depuis le mariage du prince successeur de Suède avec la princesse Ulrique, sœur du Roi, les Suédois étaient en partie portés pour les intérêts de la Prusse. M. de Rudenskjöld, ministre de la Suède à la cour de Berlin, et M. Wulfwenstierna, ministre de Suède à Dresde, étaient particulièrement attachés à la personne du Roi. Wulfwenstierna était bien dans la maison de Brühl, il faisait la partie de jeu du ministre : Brühl n'était pas aussi circonspect en sa présence qu'un premier ministre, dépositaire des secrets de son maître, doit l'être généralement envers tout le monde. Wulfwenstierna, sans qu'il lui en coûtât de peine, découvrit que le plan de la cour de Vienne et de Dresde était d'envoyer l'armée du prince de Lorraine par la Saxe, et que, joint aux troupes saxonnes, il devait pendant l'hiver marcher droit à Berlin : il fit part de sa découverte à Rudenskjöld, qui en avertit le Roi le 8 de novembre, jour même qu'on suspendait dans les églises les trophées de Friedeberg et de Soor.a Rudenskjöld ajouta que ce projet avait été fait par Brühl, corrigé par Bartenstein, amplifié par Rutowski, envoyé par Saulb à Francfort à la reine de Hongrie; que Brühl était convaincu qu'on écraserait la Prusse par ce coup, et que c'était cette ferme espérance qui avait empêché la cour de Vienne et celle de Dresde d'adhérer aux sentiments pacifiques du roi d'Angleterre; qu'on avait de plus partagé les dépouilles de la Prusse de façon que le roi de Pologne aurait les évêchés de Magdebourg, de Halberstadt, avec Halle et son territoire, et que l'Impératrice reprendrait la Silésie. Il apprit de plus au Roi la


a D'après les gazettes de Berlin, les trophées des victoires de Hohenfriedeberg et de Soor furent suspendus dans l'église de la garnison de Berlin, non pas le 8, mais le 11 novembre 1745, entre midi et une heure.

b Ferdinand-Louis de Saul, conseiller de légation saxon. Voyez ci-dessus, p. 95.