221. A L'ÉLECTRICE MARIE-ANTONIE DE SAXE.

Berlin, 29 mai 1779.



Madame ma sœur,

La lettre gracieuse de Votre Altesse Royale m'a été rendue ici, à mon retour, et rien sans doute ne pouvait m'être plus agréable que de<358> mériter l'approbation de la diva Antonia. Il faut en même temps rendre justice à l'Impératrice-Reine, dont la modération a beaucoup contribué à l'heureuse conciliation des princes d'Allemagne,358-a et qui, par grandeur d'âme, a préféré les sentiments de l'humanité à ceux qu'une ambition effrénée pouvait inspirer à des âmes uniquement enivrées du machiavélisme. Ce serait ainsi, madame, que bien des procès, bien des guerres seraient évités, si l'on voulait seulement s'entendre. La cour de France et celle de Russie ont été les organes et les interprètes de l'équité, et leurs soins infatigables et la droiture de leurs procédés ont contribué infiniment de même à faire rentrer les choses dans l'ordre accoutumé.

J'ai vu, par leur exemple, combien le rôle de médiateur est difficile à remplir, et je crains bien de n'avoir pas les talents propres à imiter ces deux puissances, en m'érigeant comme médiateur entre la princesse Gallean et l'Électeur palatin. Si, comme la France a garanti la constitution germanique par le traité de Westphalie, j'avais garanti les pensions que le prince Gallean devait recevoir de l'Électeur palatin, il me serait peut-être permis de faire des représentations audit électeur. Mais ce n'est pas le cas où je me trouve, et d'ailleurs, ce prince me fait l'honneur d'être très-fâché contre moi de ce que je suis parvenu à lui faire rendre ce qu'on lui avait ôté, ce qui est très-impertinent de ma part.

C'est en faisant des vœux pour la conservation de V. A. R. que je la prie de me croire avec toute la considération possible, etc.


358-a Voyez t. VI, p. 191 et suivantes.