<59> tient au cœur, il y aura moyen de la terminer d'une manière convenable. L'Impératrice vous demande de ne point accorder le passage aux troupes saxonnes. Mon époux songe si peu à en envoyer en Pologne, qu'il a déjà donné ordre à celles qui sont dans ce royaume de revenir en Saxe. Il ne veut tenir la couronne que des libres suffrages de la nation, et si l'impératrice de Russie refuse absolument de l'aider de ses bons offices, il se réduira à lui demander au moins de ne lui être pas contraire. Ne me refusez pas, Sire, de faire une tentative pour cet effet; je me persuade qu'elle réussira. Vous avez de si bonnes raisons à alléguer! Et vous saurez bien les faire valoir. Ma reconnaissance égalera l'importance du service, et les sentiments d'admiration et d'attachement avec lesquels je suis, etc.

14. A L'ÉLECTRICE MARIE-ANTONIE DE SAXE.

Potsdam, 16 novembre 1763.



Madame ma sœur,

J'ai eu la satisfaction de recevoir deux lettres de Votre Altesse Royale et Électorale. Pour la première, madame, qui regarde les bouffons, je vous répondrai sans peine. Quoique leur jeu me paraisse excessivement outré, je les garderai, madame, jusqu'à ce qu'ils trouvent à se placer ailleurs. Pour la seconde lettre que vous avez eu la bonté de m'écrire, la matière est délicate, et le sujet embarrassant. Si j'avais, madame, des couronnes à donner, je placerais la première sur votre tête, comme très-digne de la porter. Mais, madame, je suis bien loin d'être dans cette position-là. Je sors d'une guerre affreuse, que mes ennemis m'ont faite avec un acharnement qui a peu d'exemples; je tâche de cultiver l'amitié de tous mes voisins, et de ne me brouiller