<8>Cent fois j'ai vu tes mains ingrates,
Par d'indignes raffinements,
Caresser les morts, que tu flattes
Pour mieux déchirer les vivants.
Tes crimes, que la nuit recèle,
Craignent le jour qui te décèle,
Semblable aux lugubres corbeaux
Qui, dans les cyprès les plus sombres,
De leurs cris effrayant les ombres,
S'attroupent autour des tombeaux.

Et toi, venimeuse vipère,
Toi, dont la morsure d'aspic
Blessa ce régent débonnaire,
Prince né pour le bien public,
Tigre sanguinaire et sauvage,
Je renonce à l'ingrat ouvrage
D'adoucir tes féroces mœurs;
Plutôt, sous son ardent tropique,
Le Maure des monstres d'Afrique
Pourrait-il dompter les fureurs.

Soyez l'émule de Virgile,
Et régnez sur le double mont;
Mais les hurlements de Zoïle
Vous dégradent de l'Hélicon,
Et l'aigle audacieuse et fière
Qui s'élevait dans sa carrière
Jusqu'au palais du dieu du jour,
Baissant l'aile qu'elle déploie,
Subitement oiseau de proie,
Se change en rapace vautour.