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ÉPITRE I. A MON FRÈRE DE PRUSSE.a

O vous à qui je dois le plus sincère amour,
En qui j'aime le sang qui nous donna le jour,
De mes plus chers parents la ressemblante image,
Vous, qui de leurs vertus héritez l'assemblage,
O frère en qui je vois briller, avant les ans,
Toutes les qualités qu'ont les héros naissants,
Recevez d'un cœur franc un hommage sincère :
La vérité vous parle, elle a droit de vous plaire.
Votre esprit, par les arts dès l'enfance éclairé,
De l'orgueil d'un grand nom ne s'est point enivré;
De vos aïeux fameux, que nous vante l'histoire,
Vous ne prétendez point emprunter votre gloire;
Toute gloire étrangère est indigne à vos yeux :
La vertu, les talents ont-ils besoin d'aïeux?b
Le courage d'Albert qu'on surnomma l'Achille
N'est pour ses descendants qu'une leçon utile;
Celui qui de Nestor mérita le surnom,
Et ce prince éloquent qu'on nomma Cicéron,
Ont reçu pour eux seuls ce tribut légitime
Qu'aux talents, aux vertus doit la publique estime;


a Voyez t. IV, p. 252.

b Voyez t. IX, p. 43, 141 et 142.