12872. AU CONSEILLER PRIVÉ DE LÉGATION BARON DE KNYPHAUSEN ET AU SECRÉTAIRE MICHELL A LONDRES.

Thiemendorf, 10 mai 1761.

Votre dépêche du 28 avril m'est heureusement parvenue ici. Comme j'ai laissé mes instructions au ministre d'État comte de Finck avant mon départ de Meissen,378-3 il vous instruira sur tout ce qui fait le sujet de votre dépêche. Je veux cependant vous faire observer en peu de mots que mes soupçons se fortifient de plus en plus qu'il y a encore un esprit de conquête dans les Indes parmi les ministres anglais, et que c'est proprement par là qu'ils se raidissent encore contre la suspension d'armes et contre les époques proposées par la France.378-4 Je souhaite que l'Angleterre ne regrette jamais ses raisons, pour ne pas rendre par un armistice les Français à même de tirer de nouvelles<379> ressources de ses possessions dans les Indes. Il me semble qu'on saurait convenir que les flottes et les vaisseaux de part et d'autre resteraient pendant la suspension d'armes, jusqu'à la paix faite, là où ils sont, sans rien entreprendre. Si celle-ci me paraît avoir parlé dans sa réponse379-1 d'un ton plus haut, il faut l'attribuer à ce que la France se voit obligée d'agir en tout cela de concert avec ses alliés et de parler d'un ton commun; je souhaite seulement que Bussy arrive à Londres, alors je me flatte que tout prendra une toute autre tournure, la France pouvant alors s'expliquer seule envers l'Angleterre.

Vous pouvez penser vous-même qu'il m'est bien difficile d'expliquer mes idées au ministère anglais touchant les intérêts de l'Allemagne, avant qu'on ne soit convenu d'un armistice. Si les opérations de guerre continuent, les évènements changent du jour au lendemain les choses. Si mes ennemis ont des avantages sur moi ou sur l'armée alliée, cela haussera leur ton et leurs prétentions. La seule chose que je puis vous dire à présent, c'est [que], comme je ne suis pas à même de donner des lois à mes ennemis, il ne faut pas qu'ils m'en donnent à leur tour, et que, d'ailleurs, je ne souscrirai jamais à aucune cession de mes États, pas même d'un village. Pour tout le reste, il faut que vous vous concertiez avec mon ministre de Finckenstein pour avoir des instructions plus amples à ce sujet.

Federic.

Nach dem Concept.



378-3 Vergl. Nr. 12862.

378-4 In dem Memoire Choiseuls (vergl. Nr. 12809) war der Vorschlag gemacht worden, „que . . les deux couronnes resteront en possession de ce qu'elles ont conquis, l'une sur l'autre, et que la situation où elles se trouveront au 1er de septembre de l'année 1761 aux Indes Orientales, au 1er de juillet de ladite année aux Indes Occidentales et en Afrique, et au 1er de mai prochain en Europe, sera la position qui servira de base au traité“ .

379-1 Brief und Memoire Choiseuls, d. d. Versailles 19. April.