„La cour de Russie a fait déclarer ici in petto par le prince Galizin qu'elle ne prétendait pas conserver la Prusse, qu'elle désirait un congrès et inclinait pour la paix autant que personne. L'ambassadeur de la cour impériale1 a dit sans affectation, à plusieurs reprises, qu'il espérait d'être bientôt moins affairé, que la paix pourrait se faire, et qu'elle était a désirer pour tout le monde. Il est vrai que tout le monde la souhaite ici, il ne s'agit que d'être sincère. Il y a de la méfiance entre cette cour et les deux Impératrices, même du mécontentement sur l'élection d' un électeur de Cologne et celle du prince Charles2 pour grand-maître teutonique. On ne veut pas confondre ici la guerre avec l'Angleterre et celle d'Allemagne, l'intérêt ne demande pas que les choses traînent en longueur. On ne l'ignore pas à Vienne, où les propos pacifiques ne se tiennent que pour gagner du temps [pour] faire entamer la campagne, dans l'espérance de quelque succès, soit en Silésie soit en Saxe, avant que la France, dégoûtée par tant d'endroits, fasse sa paix particulière avec l'Angleterre et se tienne, pour l'Allemagne, à l'article des 24000 hommes du traité de Vienne. Quand on parle à M. de Choiseul sur les bruits de paix, il répond qu'il faudra voir. Ses discours sont modestes et fermes. Il doit se trouver présentement dans un grand embarras. Il voudrait la paix, il la doit, le moment parait avantageux, la nation le comblerait de louanges; la cour de Vienne, d'un autre cote, voudra qu'on pousse les avantages; la marquise de Pompadour s'appuie par des raisons particulières, sans doute parcequ'elle les croit liées avec le bien public, et le ministre doit ménager la chèvre avec les choux. Dans les premières années de la guerre, le ministère de Versailles prétendait ne retrouver la paix avec l'Angleterre qu'à Hanovre; reste à savoir le cas que le roi régnant d'Angleterre fait de ce pays-la, et que la cour de Vienne n'y parviendrait avec le roi de Prusse qu'à Dresde et Berlin. Tels peuvent être encore actuellement les sentiments de la France et telles les causes des efforts qu'elle se prépare de faire cette année pour parvenir au premier point, si elle ne peut pas parvenir à s'entendre avec l'Angleterre.
Il y a beaucoup de remue-ménage en Pologne, le ministre de France s'en mêle; j'ignore cependant jusqu'à quel point la cour de Varsovie veut un successeur désigné pour la couronne. Le duc de Courlande3 se trouve appuyé par la famille et clients de la femme qu'il a épousée; la Dauphine veut le prince Xavier, qui est son favori, et par le canal de la Marquise, qui est bien aise de la ménager ; elle lui procure ici tout l'appui possible. Il n'est pas question du Prince électoral. Un autre parti en Pologne est pour la liberté de l'élection; cela peut avoir des suites.“
Vous verrez au moins par là que je ne suis point me trompé dans toutes les conjectures que j'ai formées sur ce sujet, et que je n'ai rien oublié de ma part da tout ce qui peut contribuer au rétablissement de la paix entre l'Angleterre et la France, et à celle d'une pacification générale qui en sera une suite immanquable. Aussi pourrez-vous tirer une copie de cette lettre pour la faire lire aux ministres, et leur répéter à cette occasion tout ce dont mes derniers ordres vous chargent sur ce grand et important objet.
Federic.4
Nach der Ausfertigung.
1 Starhemberg.
2 Prinz Karl von Lothringen.
3 Prinz Karl von Sachsen.
4 Der König theilt am 28. April dem Grafen Finckenstein mit, er habe Ordre an das preussische Feldkriegsdirectorium in Sachsen gegeben, von den an Hannover verpfändeten sächsischen Aemtern kein „don gratuit“ und keinerlei Abgaben einzufordern. Vergl. Nr. 12736.