<222>crois qu'ils ne risquent rien avec les auxiliaires, tant que le nombre des nationaux leur est supérieur.

Machiavel n'écrivait que pour de petits princes. Son ouvrage n'est composé que de concetti politiques; il n'y a presque pas un endroit où l'auteur n'ait l'expérience contre lui. Je pourrais alléguer une infinité d'exemples d'armées composées d'auxiliaires, qui ont été heureuses, et de princes qui se sont bien trouvés de leurs services.

Ces guerres de Brabant, du Rhin et d'Italie, où l'Empereur, réuni avec l'Empire, l'Angleterre et la Hollande, gagnait des batailles sur les Français, les chassait d'Allemagne et d'Italie, et les matait en Flandre, ces guerres ne se firent qu'avec des auxiliaires. L'entreprise par laquelle trois rois du Nord dépouillèrent Charles XII d'une partie de ses États d'Allemagne s'exécuta pareillement avec des troupes de différents maîtres réunis par des alliances; et dans la guerre de l'année 1734, que la France commençaa sous le prétexte de soutenir les droits de ce roi de Pologne toujours élu et toujours détrôné, les Français joints aux Savoyards firent la conquête du Milanais et de la plus grande partie de la Lombardie.

Que reste-t-il à Machiavel après tant d'exemples, et à quoi se réduit l'allégorie, tout ingénieuse qu'elle est, des armes de Saül, que David refusa à cause de leur pesanteur, lorsqu'il devait combattre Goliath?a Ce n'est que de la crême fouettée. J'avoue que les auxiliaires incommodent quelquefois les princes; mais je demande si l'on ne s'incommode pas volontiers, lorsqu'on y gagne des villes et des provinces.

A l'occasion de ces auxiliaires, Machiavel jette son venin sur les Suisses qui sont au service de France. Je dois dire un petit mot sur le sujet de ces braves troupes, car il est indubitable que les Français ont gagné plus d'une bataille par leur secours, qu'ils ont rendu des services signalés à cet empire, et que si la France congédiait les Suisses et les Allemands qui servent dans son infanterie, ses armées seraient beaucoup moins redoutables qu'elles ne le sont à présent.


a Voyez t. I, p. 189 et 190.

a I Samuel, XVII, v. 38 et 39.