<9>poids s'appesantit par la durée, et qui deviennent souvent insupportables aux âmes les plus fermes et à ceux même dont la constance paraît inébranlable dans les périls les plus évidents.

M. Jordan était né avec un esprit vif, pénétrant, et en même temps capable de beaucoup d'application. Sa mémoire était vaste, et contenait, comme dans un dépôt, le choix de ce que les bons écrivains dans tous les siècles ont produit de plus exquis. Son jugement était sûr, et si son imagination était brillante, elle était toujours arrêtée par le frein de la raison. Sans écart dans ses saillies, sans sécheresse dans sa morale, retenu dans ses opinions, ouvert dans ses discours, préférant la secte académique aux autres opinions des philosophes, ardent à s'instruire, modeste à décider, aimant le mérite et le faisant connaître, plein d'urbanité et de bienfaisance, chérissant la vérité et ne la déguisant jamais, humain, généreux, serviable, bon citoyen, fidèle à ses amis, à son maître et à sa patrie, sa mort fut un deuil pour les honnêtes gens, la malignité de l'envie se tut devant lui, le Roi et tous ceux qui le connurent, l'honorèrent de leurs regrets sincères.

Telle est la récompense du vrai mérite, d'être estimé pendant la vie, et de servir d'exemple après la mort.