<307>gion leur fût enseignée séparément, sans mêler mal à propos, comme on fait, l'une avec l'autre, parce qu'il arrive trop souvent de ce mélange mal entendu que, en devenant incrédules, ils deviennent malhonnêtes gens; c'est un des grands inconvénients de l'éducation ordinaire.

M. Helvétius m'a appris lui-même son arrivée et l'accueil que V. M. lui a fait. Il ne connaissait que le héros et le grand roi, il connaît à présent le philosophe digne d'être aimé; il a trouvé V. M. au-dessus de sa renommée, et c'est assurément beaucoup dire.

Je ne sais pourquoi V. M. paraît presque honteuse de la poésie dont elle fait son délassement. Elle soupçonne, je le sais, ma philosophie de ne pas aimer les vers. Mais ma philosophie mériterait bien peu ce nom, si elle pensait de la sorte; elle ne connaît point d'écrivains préférables aux excellents poëtes; elle ne méprise que les vers dont l'auteur ne sait ni penser, ni peindre, ni sentir; et c'est assurément, Sire, ce qu'on ne saurait reprocher aux vôtres. Tout est hochet d'ailleurs en ce monde, à commencer par la philosophie; il n'y a de dangereux que les hochets des théologiens, parce qu'ils en font des massues pour assommer les sages; pour ces hochets-là, il faut les arracher, si on peut, à ceux qui s'en servent, les mettre en pièces, et les leur jeter à la tête. C'est ce qu'on a tâché de faire, quoique tout en douceur, dans l'Histoire de la destruction des jésuites, que sans doute V. M. aura reçue; aussi les fanatiques des deux partis, les jansénistes surtout, jettent les hauts cris contre l'auteur; ces animaux-là, qui se font assommer dans leurs greniers pour la gloire de Dieu, trouvent mauvais qu'on leur donne sur les oreilles des coups de plume pour l'honneur de la raison.

Le détail où V. M. veut bien entrer sur ma santé me pénètre de la plus vive reconnaissance. Mon estomac est enfin rélabli, grâce au régime que je suis après l'avoir cherché longtemps et avoir chassé les médecins; mais il y a succédé une faiblesse de tête qui vient de la diminution de nourriture, et qui, m'interdisant souvent toute application, a retardé, à mon très-grand regret, la réponse que je devais à V. M.

On dit que l'Attila, l'Alaric, le Tamerlan du Gévaudan, contre