« <353>de Très-Chrétien; le glaive dont Dieu arma votre bras vous est donné pour défendre l'Église. La religion est outragée, elle réclame votre assistance. Il faut que le sang du coupable soit versé en expiation de l'offense, et pour le premier et le plus ancien royaume du monde. »

Je vous assure, quand même tous les encyclopédistes se trouveraient présents à cette harangue, qu'ils n'arracheraient pas des mains des prêtres la victime que ces barbares auraient résolu d'immoler.

Si d'aussi horribles scandales se commettent moins ailleurs qu'en France, il faut l'attribuer à la vivacité de votre nation, qui se porte toujours aux extrêmes. Ce n'est pas seulement en France où l'on trouve un mélange d'objets dont les uns excitent l'admiration, et les autres le blâme; je crois qu'il en est de même partout : l'homme étant imparfait lui-même, comment produirait-il des ouvrages parfaits?

Votre royaume a été subjugué par les Romains, les Saliens, les Francs, les Anglais, et par la superstition; ces conquérants ont tous promulgué des lois, ce qui a fait un chaos de votre jurisprudence. Pour bien faire, il faudrait détruire et réédifier. Ceux qui l'entreprendront trouveront contre eux la coutume, les préjugés, et tout le peuple attaché aux anciens usages sans savoir les apprécier, et qui croit qu'y toucher, et bouleverser le royaume, c'est la même chose.

Vous approuvez, à ce que je crois, le gouvernement de la Pensylvanie, tel qu'il est établi à présent; il n'existe que depuis un siècle; ajoutez-en encore cinq ou six à sa durée, et vous ne le reconnaîtrez plus, tant l'instabilité est une des lois permanentes de cet univers. Que des philosophes fondent le gouvernement le plus sage, il aura le même sort. Ces philosophes mêmes ont-ils toujours été à l'abri de l'erreur? N'en ont-ils pas débité aussi? Témoin les formes substantielles d'Aristote, le galimatias de Platon, les tourbillons de Des Cartes, les monades de Leibniz. Que ne dirais-je pas des paradoxes dont Jean-Jacques a régalé l'Europe, si cependant on peut compter parmi les philosophes celui qui a bouleversé la cervelle de quelques bons