<294>il s'est formé, en très-peu de temps, dans un art nécessaire aux bons officiers, et très-rare, dont il n'avait pas la plus légère connaissance; vous serez touché de sa reconnaissance, et du zèle avec lequel il consacre ses jours à votre service. Son extrême sagesse m'étonne toujours; on a dessein de faire revoir son procès, qu'on ne lui a fait que par contumace. Ce parti me paraît plus convenable et plus noble que celui de demander grâce; car enfin grâce suppose crime, et assurément il n'est point criminel, on n'a rien prouvé contre lui. Cela demandera un peu de temps, et il se peut très-bien que je meure avant que l'affaire soit finie; mais j'ai légué cet infortuné à M. d'Alembert, qui réussira mieux que je n'aurais pu faire.

J'ose croire qu'il ne serait peut-être pas de votre dignité qu'un de vos officiers restât avec le désagrément d'une condamnation qui a toujours dans le public quelque chose d'humiliant, quelque injuste qu'elle puisse être. En vérité, c'est une de vos belles actions de protéger un jeune homme si estimable et si infortuné; vous secourrez à la fois l'innocence et la raison; vous apprendrez aux Velches à détester le fanatisme, comme vous leur avez appris le métier de la guerre, supposé qu'ils l'aient appris. Vous avez toutes les sortes de gloire; c'en est une bien grande de protéger l'innocence à trois cents lieues de chez soi.

Daignez agréer, Sire, le respect, la reconnaissance, l'attachement d'un vieillard qui mourra avec ces sentiments.

497. A VOLTAIRE.

Potsdam, 18 novembre 1774.

Ne me parlez point de l'Élysée. Puisque Louis XV y est, qu'il y demeure. Vous n'y trouveriez que des jaloux : Homère, Virgile, Sophocle, Euripide, Thucydide, Démosthène et Cicéron, tous ces gens ne vous verraient arriver qu'à contre-cœur; au lieu que,