<112>pourra rendre la race future plus tolérante que celle de notre temps; et c'est beaucoup gagner.

On vous aura l'obligation d'avoir corrigé les hommes de la plus cruelle, de la plus barbare folie qui les ait possédés, et dont les suites font horreur.

Le fanatisme et la rage de l'ambition ont ruiné des contrées florissantes dans mon pays. Si vous êtes curieux du total des dévastations qui se sont faites, vous saurez qu'en tout j'ai fait rebâtir huit mille maisons en Silésie; en Poméranie et dans la Nouvelle-Marche, six mille cinq cents; ce qui fait, selon Newton et d'Alembert, quatorze mille cinq cents habitations.

La plus grande partie a été brûlée par les Russes. Nous n'avons pas fait une guerre aussi abominable; et il n'y a de détruit de notre part que quelques maisons dans les villes que nous avons assiégées, dont le nombre certainement n'approche pas de mille.a Le mauvais exemple ne nous a pas séduits; et j'ai, de ce côté-là, ma conscience exempte de tout reproche.

A présent que tout est tranquille et rétabli, les philosophes, par préférence, trouveront des asiles chez moi, partout où ils voudront, à plus forte raison l'ennemi de Baal, ou de ce culte que, dans le pays où vous êtes, on appelle la prostituée de Babylone.

Je vous recommande à la sainte garde d'Épicure, d'Aristippe, de Locke, de Gassendi, de Bayle, et de toutes ces âmes épurées de préjugés que leur génie immortel a rendues des chérubins attachés à l'arche de la vérité.

Si vous voulez nous faire passer quelques livres dont vous parlez, vous ferez plaisir à ceux qui espèrent en celui qui délivrera son peuple du joug des imposteurs.


a Cela ne va certainement pas à mille maisons. (Variante des Œuvres posthumes, t. IX, p. 371.)