<28>Je n'ose demander à V. A. R. des nouvelles de ses progrès en physique, car je vois, par les lettres dont elle honore M. de Voltaire, que Machiavel et la poésie ont la préférence. J'espère pourtant que quelque jour vous donnerez quelques moments à une science si digne de vous occuper, et je vous avoue, monseigneur, que mes désirs là-dessus sont un peu intéressés, car je me flatte que mon commerce en serait plus agréable à V. A. R.

Je ne puis vous exprimer la tristesse que j'ai sentie dans mon voyage au pays de Liége, quand j'ai pensé que, l'année passée, V. A. R. était presque dans ces cantons. Mais, monseigneur, n'y reviendrez-vous jamais? Je prévois que je jouerai longtemps ici le rôle de la comtesse de Pimbesche,c et je m'en console dans l'espérance que mes procès me feront gagner le temps où le Roi votre père viendra voir ses États méridionaux, car je compte revenir de Paris ici pour mon hiver, et plus.

V. A. R. a su sans doute que l'abbé Desfontaines a été obligé de désavouer la Voltairomanie entre les mains de M. Hérault, lieutenant de police, et que son désaveu a été mis dans les gazettes. L'intérêt que V. A. R. a daigné prendre à cette malheureuse affaire, et la façon pleine de bonté dont elle a bien voulu m'en parler, m'ont fait croire que ce détail lui serait agréable.

Nous reverrons Thieriot à Paris, et je me sens fort portée à user envers lui de cette indulgence dont la faiblesse de son caractère me paraît très-digne, et à laquelle V. A. R. m'a exhortée. C'est à vous, monseigneur, à donner l'exemple de toutes les vertus; ceux qui les admirent de près sont plus heureux, mais personne ne peut être avec plus de respect et d'attachement que moi, etc.


c Voyez les Plaideurs, comédie de Racine, acte I, scène VII.