3. A ROLLIN.

Remusberg, 20 février 1737.



Monseigneur

Vous vous êtes si bien dépeint dans vos ouvrages, peut-être sans le savoir, que je vous connais aussi intimement que si j'avais la satisfaction de vous avoir fréquenté longtemps.

Je respecte en vous, monsieur, le caractère d'un homme de probité, d'un homme intègre, et qui, rempli d'amour pour le genre humain, ne borne pas ses travaux à enseigner, mais à former les mœurs des personnes de tout âge. La France vous sera redevable, avec le temps, d'un peuple de héros, d'un peuple de <233>savants, que vous avez instruits, et qui, n'ayant pour but que la solide gloire, feront consister leur véritable grandeur dans des sentiments de cœur épurés de tout vice et uniquement portés à la vertu. Nos Allemands, plus dociles à vos leçons qu'à celles de leurs parents, vont s'empresser à marcher dans la carrière que vous leur avez ouverte. La vertu, dépeinte avec les vives et belles couleurs dont vous composez son coloris, trouve des attraits pour un chacun, et vous assurez son triomphe en diffamant le vice jusque sous l'appareil de la grandeur du rang et de la plus splendide magnificence. C'est là votre ouvrage, et c'est sans contredit par quoi vous égalez votre réputation à celle des souverains et des monarques.

Je me trouve fort flatté de ce que vous voulez bien distinguer ma faible voix dans un concert de tant de milliers de personnes qui chantent vos louanges.

Je vous ai une reconnaissance particulière de votre Histoire ancienne, et je me crois obligé de vous la témoigner. Mon estime vous est acquise; elle vous était due il y a longtemps. C'est un tribut que votre mérite est en droit d'exiger de tout le monde.

Je serai toujours avec ces mêmes sentiments,



Monseigneur

Votre très-affectionné
Frederic.