38. AU MÊME.

Ce 31.

Le Gouverneur a très-bien reçu le billet, et il remercie le cher Cassubien du bon avis et de l'avertissement qu'il lui donne. Le conseil sera entièrement suivi. L'on se prépare pour partir vers Potsdam, où l'on sera demain au soir. L'on sera pourtant obligé d'user de tous les égards vers la Barbe,92-a car de certaines marques de politesse sont dues à tout le monde. Je vous prie de faire mille amitiés de ma part à Germania.92-b J'espère que pour le moins nous ferons un camp, et que cette année on nous donnera occasion de jouer du moulinet; j'en serais ravi, car je crains que sans cela la force de mon bras ne se perde dans le repos.93-a A présent, je pourrais encore devenir écolier militaire; à l'âge de trente ans, l'on n'a guère de disposition pour apprendre, et un métier <86>tel que celui de la guerre mérite plus que les applications de la vieillesse. Il faut y être élevé et nourri, et qu'une pratique plutôt prématurée que trop tardive nous enseigne cet état. La guerre hors de nos confins et limites ne laisse pas que d'être utile et nécessaire; elle corrige la luxure et le faste, elle apprend la sobriété et l'abstinence, elle rend notre corps capable de supporter des fatigues, et elle déracine tout ce qui est efféminé. Je crains que je ne vous arrête trop, cher Cassubien, et j'oublie que je parle d'un métier que je ne connais pas à un homme qui en possède toute la connaissance et la finesse par une longue pratique. Mais l'on doit savoir que les jeunes gens aiment beaucoup à raisonner et à décider; ils vous en demandent pardon, et se disent fidèles amis du digne Cassubien.

Le Gouverneur.


92-a Le prince d'Anhalt-Dessau.

92-b Le comte de Seckendorff.

93-a

La vigueur de mon bras se perd dans le repos.

Molière,

Amphitryon

, acte I, scène II.