<255>combattez donc pas ma constance et ma fermeté, mon cher Suhm, car c'est sur elle que se soutient la véritable amitié que j'ai pour vous, et à laquelle je ne renoncerai pas plus qu'au désir de me perfectionner, afin d'être, pendant tout le cours de ma vie, honnête homme, ami des arts, et surtout, avec une sincérité parfaite, fidèle ami de tous mes amis. Ainsi jugez à quel point je suis,



Mon très-cher Suhm,

Votre très-affectionné
Frederic.

7. AU MÊME.

Ruppin, 27 mars 1736.



Mon cher Suhm,

C'est à vos soins officieux que je suis encore redevable du second chapitre de Wolff. Sans blesser votre modestie, et en me resserrant dans les limites les plus étroites de la vérité, je puis vous assurer que Wolff ne perd rien en passant par vos mains, et je trouve que vous vous acquittez avec tout le succès possible d'une entreprise aussi noble que difficile.

Enfin, je commence à apercevoir l'aurore d'un jour qui ne brille pas encore tout à fait à mes yeux; et je vois qu'il est dans la possibilité des êtres que j'aie une âme, et que même elle soit immortelle. M. Achard m'envoie un grand raisonnement sur cette matière,a qui doit servir de supplément aux sermons qu'il nous a faits cet hiver; et il me demande de lui faire voir les endroits de son raisonnement que je trouverai les plus faibles. Mais je m'en garderai bien; car, quoique la plupart des raisons qu'il m'allègue soient des sophismes plutôt que des arguments, je ne m'ingérerai pas à entrer en lice avec des personnes qui ont étudié, et qui en savent infiniment plus que moi. Je m'en tiens à Wolff, et, pourvu qu'il me prouve bien que mon être indivisible est immortel, je serai content et tranquille.


a Voyez ci-dessus, p. 121-123.