<44>Renouveler l'affreux tableau?
Lorsque de l'occident amenant les ténèbres,
Étendant sur l'azur des deux
Les crêpes épaissis de ses voiles funèbres,
La nuit vient cacher à nos yeux
De l'astre des saisons le globe radieux,
Philomèle au fond d'un bocage
Ne fait plus retentir de son tendre ramage
Les échos des forêts alors silencieux;
Elle attend le moment que la brillante aurore,
Versant le nectar de ses pleurs,
Avec l'aube nous fasse éclore
Le jour, les plaisirs et les fleurs.
Ma sœur, en suivant son exemple,
Muet dans ma douleur, sensible à nos revers,
Laissant pendre mon luth, laissant dormir les vers,
J'attends que la Fortune, à la fin, de son temple
Me rende les sentiers ouverts.
Mais si je vois que la cruelle
D'un caprice obstiné me demeure infidèle,
Du fond de ses tombeaux et des urnes des morts
Je n'entonnerai point la plaintive élégie
Dont l'artifice et la magie.
Par ses lamentables accords
Versant sur les esprits sa triste léthargie,
Les endort sur ses sombres bords.
Ah! plutôt sur le ton de la vive allégresse
J'aimerais à monter mon luth,
Suivre des ris la douce ivresse,
Aux plaisirs payer mon tribut.
Qui se trouve au milieu de fleurs à peine écloses,
Respirant leurs parfums, contemplant leurs attraits,
Choisit l'œillet, les lis, les jasmins et les roses,
En se détournant des cyprès.
Tandis que ces riants objets
A moi se présentent en foule,
Emporté d'un rapide cours,